Je suis en colère contre ma psy. C’est quoi la thérapie au final ?

Question posée par Julie :

« Je suis en psychothérapie et un jour lors d’une séance, j’ai voulu parler de l’agression physique ainsi que la séquestration que j’avais subi, dans mon logement par mes propriétaires. Cela a duré 1 heure, et il y a eu de la violence physique et psychologique. Ma plainte n’a jamais abouti.

Je ne me sentais pas capable de raconter, cet événement traumatique et j’ai fait lire à ma psychologue, le courrier que j’avais envoyé à mon avocat, au moment de l’agression qui expliquait de manière assez détaillée, ce que j’avais subi.

Ma psychologue l’a lu, et la première chose qu’elle m’a dit c’est que mon courrier était super bien présenté et que c’était bien écrit. Je suis restée choquée par sa réaction, qui m’a semblé complètement inadaptée vu l’effort que je faisais pour déjà lui faire lire ce courrier. Je lui ai dit bien plus tard, plusieurs mois après, que sa réaction m’avait surprise. Nous n’avons pas du tout parlé de ce qui m’est arrivée, lors de la séance ou elle a lu ce courrier, ni même après. Je lui en veux toujours de sa réaction, et je me sens toujours en colère.

Je me demande si c’est normal ? L’autre jour, je faisais un point en lui demandant si j’avançais en thérapie, elle me dit que je ne fais que raconter et que c’est beaucoup de factuel, je ne parle que rarement de mes ressentis émotionnels, car cela semble être bloqué. Je ne pleure pas, je suis triste parfois.

Cela fait 2 ans que je vois cette psychologue et je me demande si elle me convient ? Pourriez-vous me donner votre avis sur sa réaction à la lecture de mon courrier ? Et du coup, s’il ne faut plus raconter, c’est quoi la thérapie au final, comment ça doit se faire ? »

Mes pistes de réponse :

Je ne suis pas votre psychothérapeute donc je ne peux pas vous répondre à sa place.
Mais ce dont je suis certain c’est que vous avez le droit, donc que vous êtes pleinement légitime, de lui poser les questions qui vous assaillent, y compris les questions liées à son éventuel comportement.

Il ne faut pas que vous laissiez s’immiscer, entre vous et elle, des questionnements qui peu à peu affaibliraient votre confiance et deviendraient des obstacles à votre travail thérapeutique si précieux pour vous-même.

Dire que votre courrier était « bien écrit » ne m’apparaît pas une cause de suspicion a priori de ses compétences professionnelles. Par contre je mesure à quel point vous avez pu vous sentir blessée par sa remarque (ou plutôt par son absence de remarque), son absence de prise en compte du courage qui a été le vôtre au moment où vous avez osé partager pour la mettre à jour, l’agression dont vous avez été la victime.

Elle semble donc ne pas avoir mesuré l’ampleur de la dimension traumatique qui a été la vôtre ou du moins n’a pas souhaité vous montrer qu’elle l’avait mesurée.

Par définition, toutes les émotions qui peuvent être les vôtres dans votre relation à votre thérapeute sont « normales », en ce sens qu’il faut que vous arriviez à comprendre que l’ensemble de vos projections émotionnelles sur la personne même du thérapeute sont au cœur de votre thérapie. Je vous invite et vous conseille donc d’en profiter.

Soyez assurée que quand – à l’occasion d’un point avec lui – votre thérapeute vous dit que vous racontez essentiellement des éléments factuels et que vous parlez bien peu de vos « ressentis émotionnels », c’est bel et bien pour vous inviter à en parler.

Voilà donc, en effet, une très belle occasion d’exprimer votre colère. Comme il vous l’a dit, votre thérapeute n’attend que ça.

Je découvre donc en même temps que vous que le travail que vous faites depuis deux ans avec votre thérapeute vous mène aujourd’hui à ressentir le besoin d’exprimer votre émotion plutôt qu’à la refouler.

Vous pouvez prendre confiance dans le fait que la thérapie est bel et bien le lieu où vous allez pouvoir explorer les émotions qui sont les vôtres avec un minimum de risques.

La règle de base de la thérapie est la transparence totale qui vous permettra de dire « tout ce que vous avez sur le cœur » (plutôt que de garder les choses pour vous.)

Votre boulot est donc de dévoiler pas à pas tous vos sentiments comme toutes vos pensées, en n’hésitant pas à vous servir pour cela de vos projections sur la personne même du thérapeute.

Donc – loin de vous décourager – je vous invite à continuer de vous dévoiler avec courage et même et surtout à oser explorer l’angoisse liée à votre prochaine séance de thérapie avec votre thérapeute. Vous pouvez être certaine que plus vous focaliserez le travail sur la relation à votre thérapeute, plus vous dynamiserez votre thérapie.

Car c’est ainsi que vous apprendrez à vous connaître et à dénouer les nœuds qui sont les vôtres.

Pour terminer je vous invite à revenir régulièrement sur cette citation du psychothérapeute Irvin Yalom :

« Tant qu’un patient persistera à croire que ses problèmes principaux résultent d’éléments qui échappent à son contrôle, le thérapeute ne pourra lui apporter qu’une aide limitée. Nous devons encourager nos patients à assumer leurs responsabilités, en d’autres termes, appréhender la façon dont eux-mêmes contribuent à leur propre détresse. »

Pour aller plus loin, vous pouvez lire : Pourquoi un travail thérapeutique ?, La confiance, le thérapeute et la relation et Projections, en vous souvenant que votre but est de parvenir à exprimer vos sentiments avec de moins en moins d’inhibition.

© 2020 Renaud PERRONNET Tous droits réservés. 


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Julie

Je suis triste… J’espère que je ne suis pas autiste, je pense que je ne vais pas faire les tests et je vais tout abandonner. Quand je vois comment les personnes sont perçues quand elles ont un handicap invisible et les méchancetés que certains sont capables de leur dire, je préfèrerai ne pas l’être, car c’est vraiment insupportable. Je pense que je n’ai plus ma place à commenter, maintenant que j’ai évoqué mon possible autisme. Je suis possiblement différente et je ne serai pas acceptée. Désolée de vous avoir livré tout ça de moi. Je me sens plus légitime à… Lire la suite »

Julie

Merci pour vos mots soutenant et cet accueil bienveillant… Je suis revenue pour vous donner de mes nouvelles… pour aider aussi les autres et parce que c’est difficile de vivre un tel tsunami intérieur. Comme je l’avais dit dans les articles précédents la psychologue spécialisée en troubles autistiques ne pouvait me faire passer les tests qu’en 2021, elle n’avait pas encore de cabinet et il fallait soit aller dans des salles réservées ou alors qu’elle vienne à mon domicile, ce qui était inenvisageable pour moi. J’ai fait une séance téléphonique avec elle, après quelques mails échangés. Et elle m’a conseillé… Lire la suite »

Julie

Merci pour votre réponse. Pour l’instant, je n’ai pas le diagnostique validé, car c’est juste sur les paroles du psychiatre et je préfère continuer à me sentir comme avant ce pré-diagnostique. J’entends votre piste concernant le fait de consulter un psychologue spécialisé dans l’autisme, sauf que la personne contactée pour les tests est débordée et ne prend pas pour l’instant de suivis. Et puis je ne suis pas diagnostiquée pour le moment, c’est juste un pré-diagnostique, qui se confirmera ou pas du tout dans plusieurs mois, le jour ou je pourrai passer les tests (2021). La semaine dernière, j’ai contacté… Lire la suite »

Adeline

Bonjour Julie, Merci pour vos commentaires, je me reconnais beaucoup dans ce que vous exprimez. Je voulais vous dire que vous n’êtes pas seule. J’ai été choquée par ce que vous avez raconté sur le comportement de votre psychologue, le fait qu’elle n’ait pas réagi à la lecture de votre lettre, qu’elle n’ait pas compris votre traumatisme et aussi qu’elle ne réponde pas aux SMS en expliquant plus tard que sa messagerie est saturée. J’aurais été très malheureuse et déçue de ce comportement qui manque de sensibilité. Gardez confiance, vous pouvez trouver quelqu’un qui vous convient pour vous suivre et… Lire la suite »

Julie

Bonsoir, Cela fera bientôt deux mois, que vous m’avez répondu… J’aimerai justement vous évoquer les changements qu’il y a eu pendant ces deux mois. J’ai continué de rencontrer la psychologue. De plus en plus, elle me disait qu’elle pensait qu’il fallait que j’aille voir un psychiatre, et que je prenne un traitement médicamenteux pour dépression. Je suis suivie en complément par une psychomotricienne. Je ne l’avais pas évoqué dans mon questionnement de départ ici. La psychologue m’a dit se sentir impuissante et les séances allaient de plus en plus mal et moi aussi. Ma psychomotricienne n’a jamais été du même… Lire la suite »

Julie

Bonjour, Merci d’avoir publié mon questionnement et d’avoir pris le temps d’y répondre avec beaucoup d’attention. Votre réponse m’a vraiment touchée, je me suis sentie vraiment comprise, éclairée, accueillie dans ma problématique. J’ai ressenti de l’apaisement et aussi cela m’a donné un autre regard, me permettant de valider que je ne faisais pas fausse route, dans mon suivi thérapeutique, contrairement à ce que j’imaginais. Mon souci principal, c’est que j’ai peur de souffrir encore, la psychologue me dit que je suis obligée de traverser la souffrance pour espérer aller mieux après. Choses que je n’arrive pas à faire. Quand j’ai… Lire la suite »