Question de Touraya :
Assistante de direction à Marseille, France.
J’ai deux garçons 11 et 7 ans, W. 11 ans est au collège avec un an d’avance. Le 1er trimestre a été bon (14,86/20 de moyenne) et depuis les vacances de Noël il a décidé de régresser, ses notes sont en chute libre, il me ment, il me cache ses devoirs et interrogations écrites.
Je suis à bout, j’ai discuté avec lui, j’ai puni, il se repli sur lui même dans un mutisme, il ne répond pas quand j’ai des discutions avec lui…
J’ai tout essayé ou alors je m’y prends mal…
J’ai besoin d’aide pour que mon fils reprenne en main sa vie scolaire et qu’il extériorise ses problèmes.
Je sais qu’il m’en veut, j’ai trouvé dans ses papiers « Je hais une certaine… » et c’est l’adresse de ma boite mail.
J’ai besoin d’aide pour que mon fils aille mieux et retrouve sa joie de vivre au lieu de toujours me cacher les choses comme il le fait depuis fin décembre…
Merci pour votre compréhension et vos précieux conseils…
Ma réponse :
La première chose à comprendre dans la relation à votre fils est que si vous « imposez » vos demandes, vous obtiendrez la soumission ou la révolte, pas la rencontre et le consentement. La seconde chose à découvrir est en définitive « ce que vous voulez faire » de lui, donc « ce que vous allez faire » avec lui. Voulez-vous – dans la relation à votre enfant – construire un pont ou un mur ?
Parce que vous me dites souhaiter le « bonheur et la joie de vivre» de votre enfant, j’ai bien compris que vous souhaitiez construire un pont. Soyez assurée que c’est par le respect et la confiance que vous parviendrez à ce qu’il s’extériorise et à ce qu’il ne cache plus ce qu’il vit.
Pourquoi votre enfant vous ment-il ? Pourquoi vous cache-t-il les choses ? Les enfants mentent, deviennent sournois et hypocrites parce qu’ils ont peur, parce qu’ils savent que s’ils disent la vérité ils seront punis. Un enfant qui se sent écouté et accepté quand il dit la vérité n’éprouve pas le besoin de mentir à son parent, c’est aussi simple que cela.
Un enfant apprend principalement à travers les comportements et les attitudes de son parent (les enfants sont des éponges), quand il vous sent vous raidir, il prend peur, se raidit et se ferme à son tour. Si cela ne peut pas être autrement pour lui, peut-être cela peut-il être autrement pour vous ?
Quelle est cette insécurité qui vous ronge de l’intérieur et vous oblige à « être à bout » avec un enfant qui est au collège avec un an d’avance et qui a eu près de 15 de moyenne au dernier trimestre ? Voudriez-vous demander à l’ex-enfant qui est en vous ce qu’il en pense ?
Un enfant qui a soudainement des notes en chute libre n’est-il pas un enfant qui vit une difficulté que vous ne connaissez pas ? Un enfant peut-il de lui-même « décider » de régresser, ou n’est-il pas plutôt lui-même la victime de ce qui lui arrive ? Un enfant « en régression » n’est-il pas le plus souvent un enfant devenu incapable de partager avec une personne de confiance les causes de ses comportements (ses mal-être) parce qu’il ne se sent plus en confiance ?
Un enfant vous ment et vous cache les choses parce qu’il vous craint au moment même où il aurait tant besoin de se sentir entendu et compris par vous.
C’est ainsi que dans le désarroi qui est le sien, votre enfant ne pouvant plus « faire confiance », se réfugie dans l’enfermement et le mutisme, quitte à confier à une feuille de papier (précieuse confidente !) la vérité de son ressenti émotionnel vis-à-vis de vous.
Vous me dites avoir « discuté » avec lui, mais avant de discuter (discuter étant le plus souvent essayer de convaincre l’autre), l’avez-vous simplement écouté ? Avez-vous réussi à lui faire réellement sentir que sa mère l’écoutait ? Surtout, comment allez-vous vous y prendre maintenant pour lui faire ressentir cela ?
Votre désarroi qui vous pousse à m’écrire en me parlant de mes « précieux conseils » vous montre à quel point vous l’aimez et que derrière vos ressentiments et vos énervements, votre cœur de mère reste ouvert.
L’éducation de votre fils ne peut se faire que dans le respect et l’amour de vos deux personnes, et je ne doute pas que l’aide que vous sollicitez soit à la mesure de l’amour que vous lui portez. La perception que vous avez de la réalité de votre relation à lui vous permet même de vous interroger lucidement : peut-être que je m’y prends mal ?
Comme il est inscrit dans les « paroles essentielles » de mon site : « Parler à un adolescent, ce n’est pas lui dire : « Maintenant je suis là pour t’aider. » C’est lui dire la phrase complète : « Je sais qu’à des moments, je n’ai pas été là quand tu m’attendais mais maintenant je suis là. »
La possible renaissance de la relation de confiance avec votre fils passe par la reconnaissance de la manière dont vous vous y êtes prise avec lui par le passé (il s’agit d’oser lui dire la vérité). Même s’il n’est pas encore adolescent, il pourra découvrir que c’est votre insécurité qui vous a obligée à vouloir « imposer » ce qui peut être partagé dans l’honnêteté et le respect de chacun. Il pourra découvrir d’autant plus facilement cela que vous aurez osé lui dire : « Je sais qu’à des moments j’ai été maladroite, je sais qu’à des moments je n’ai pas été là quand tu m’attendais. » C’est vrai (et cela je vous le dis à vous, pas pour que vous le lui disiez à lui) que les parents sont la proie de toutes sortes de pressions dans ce monde insécure, et que s’ils n’en sont pas conscients (grâce à un travail de lucidité avec eux-mêmes), ils risquent forts de les répercuter sur leur enfant.
A vous de vous situer authentiquement, vis-à-vis de lui, par rapport à ce que vous ressentez, afin de trouver les mots (et les silences) qui lui permettront de se sentir écouté et non plus jugé. Vous les trouverez dans votre capacité à oser faire confiance à l’amour que vous portez à votre enfant. Quand il le sentira, soyez persuadée qu’il s’ouvrira et renoncera de lui-même à ses protections parce qu’elles seront devenues – à ce moment – inutiles.
Ce travail intime et subtil demande du temps donc de la patience, s’il est vrai qu’il est plus aisé de détruire que de construire. Souvenez-vous que le meilleur allié de cette vertu reste l’amour que vous lui portez, afin que vous « alliez mieux », ensemble.
© 2009 Renaud PERRONNET Tous droits réservés.
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Ma formation première est celle d’un philosophe. Il est possible que les idées émises dans ces articles vous apparaissent osées ou déconcertantes. Le travail de connaissance de soi devant passer par votre propre expérience, je ne vous invite pas à croire ces idées parce qu’elles sont écrites, mais à vérifier par vous-même si ce qui est écrit (et que peut-être vous découvrez) est vrai ou non pour vous, afin de vous permettre d’en tirer vos propres conclusions (et peut-être de vous en servir pour mettre en doute certaines de vos anciennes certitudes.)