Sexisme ordinaire

« Avant mes 14 ans, les garçons de ma classe m’auront déjà traitée de salope, de pute, de connasse, de plein d’autres choses. C’est juste pour rire, bien sûr ! »

Cette phrase est extraite d’une vidéo* qui nous interpelle tous mais s’adresse spécifiquement aux hommes.

En effet, existe-t-il un seul homme qui de près ou de loin n’ait participé à l’humiliation des « filles », ne serait-ce qu’en ayant assisté à une maltraitance sexiste sans être intervenu ?

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Ci-dessous les sous-titres français du texte que vous venez d’entendre en anglais :

« Mon cher papa,

Je voulais juste te remercier de t’être si bien occupé de moi, même si je ne suis pas encore née. Je sais que tu fais déjà plus d’efforts que Superman, tu ne laisses même pas maman manger des sushis !

Mais je dois te demander une faveur.

Attention : ça concerne les garçons.

Parce que moi, je vais naître fille. Ce qui veut dire qu’avant mes 14 ans, les garçons de ma classe m’auront déjà traitée de salope, de pute, de connasse, de plein d’autres choses. C’est juste pour rire, bien sûr ! C’est typique des garçons, alors tu ne t’inquièteras pas. Et je peux le comprendre.

Peut-être que tu faisais la même chose quand tu étais jeune, en voulant impressionner d’autres garçons. Je suis sûre que tu ne pensais pas vraiment ces mots que tu employais.

Mais voilà, peut-être que tout le monde ne comprendra pas « la blague » : ce ne seront pas les filles… Ce seront certains des garçons.

Avant mes 16 ans, certains de ces garçons auront mis leur main dans mon pantalon, un soir où j’aurai tellement bu que je ne tiendrai plus debout. Et même si je dis « non », ils rigoleront. Parce que c’est drôle, non ?

Si tu me voyais ainsi papa, tu aurais tellement honte. Parce que je suis ivre. Pas étonnant que je sois violée à 21 ans.

21 ans, et sur le chemin de la maison, à l’arrière d’un taxi conduit par le fils d’un mec avec qui tu allais à la piscine tous les mercredis. Qui faisait tout le temps des blagues insultantes. Mais ce n’était que des blagues, alors tu riais.

Si tu avais su que son fils deviendrait mon violeur, tu lui aurais dit de changer de disque. Mais comment aurais-tu pu savoir ? Ce n’était qu’un garçon qui racontait des blagues bizarres, et dans tous les cas, ce n’était pas ton problème. Tu étais juste poli. Mais son fils, élevé dans ces blagues, est devenu mon problème.

Et puis, finalement, je rencontre Monsieur Perfection. Et tu es si heureux pour moi, papa, parce qu’il m’adore vraiment. Il est intelligent, il a un bon travail, va faire du ski de fond trois fois par semaine pendant tout l’hiver, exactement comme toi.

Mais un jour, il arrête d’être Monsieur Perfection, et je ne sais pas pourquoi. Attends, est-ce que je suis en train d’exagérer ? Une chose est sûre, je ne suis pas « une victime ». J’ai été élevée en tant que femme forte et indépendante. Mais un soir, c’est juste trop pour lui : entre le travail, la belle-famille, le mariage qui approche… alors il me traite de pute, exactement comme toi tu as traité une fille de pute, au collège, une fois.

Il me frappe.

Un jour, il manque de me tuer

Il me frappe. Je veux dire, j’ai vraiment dépassé les bornes, je peux être une vraie connasse parfois, mais nous sommes toujours le meilleur couple du monde, et je ne sais plus où j’en suis parce que je l’aime, et je le hais, je ne suis pas sûre d’avoir vraiment fait quelque chose de mal ?

Et un jour, il manque de me tuer.

Tout devient noir.

J’ai un doctorat, je suis aimée à la folie par ma famille et mes amies, je suis bien élevée, et personne n’a rien vu venir.

Mon cher papa, voici la faveur que je dois te demander : une chose en entraîne toujours une autre, alors arrête ce cercle vicieux, avant qu’il ne recommence.

Ne laisse pas mes frères traiter les filles de pute. Parce que ce n’est pas vrai. Et qu’un jour, un petit garçon pourra penser que c’est vrai. N’accepte pas les blagues insultantes de mecs bizarres à la piscine, ni celles de tes amis, parce que derrière chaque blague, il y a toujours une part de vérité.

Mon cher papa, je sais que tu me protègeras contre les lions, les tigres, les armes, les voitures et même les sushis, sans y réfléchir à deux fois, sans même réfléchir au danger pour ta propre vie.

Mais mon cher papa, je vais naître fille. Je t’en prie, fais tout ce qui est en ton pouvoir pour que ça ne reste pas la plus grande des menaces pour moi. »

Notes :

* Merci à Anne de me l’avoir fait connaitre.

Illustration : Merci à Yang Liu Les différences homme-femme Ed. Taschen


Pour aller plus loin, vous pouvez télécharger la fiche pratique de formation :


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27 Commentaires
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Margot

La violence morale n’a pas de genre, ok, et nous sommes nombreux à connaître des hommes victimisés par une manipulatrice. Mais la violence masculine envers les femmes est non seulement morale mais physique, sexuelle et économique. Les viols sont commis presque exclusivement par des hommes et font au minimum 50000 victimes par an chez les seules femmes adultes – on peut au moins tripler ce chiffre si l’on inclut les jeunes filles et les femmes, et on peut ajouter les centaines de milliers de victimes de viol conjugal, très peu osant porter plainte. Le terme de “prédateur” popularisé dans les… Lire la suite »

Carl Roque

La violence physique n’est pas ressentie de la même manière selon le sexe , les garçons sont systématiquement “encouragés” a endurer sans se plaindre, l’expression de certains sentiments est souvent réprimée tout au long de leur existence. Doit on apprécier la violence physique uniquement à partir des conséquences visibles?

Mathilde

Oui je suis d’accord avec vous pour la violence morale et la manipulation.

Marie

Quand je lis ces commentaires cela me fait comprendre que pour moi la violence en générale est néfaste, elle n’apporte rien de bon à part contraindre les autres par la peur ou pour se défouler. J’ai confondu la colère et la violence ce qui n’a rien à voir, j’avais écrasé ma colère, maintenant j’essaie de travailler sur ma colère, j’arrive à écouter ma colère sans l’étouffer et j’essaie de ne plus la retourner contre moi quand je la sens, maintenant il m’arrive de la retourner sur une autre personne mais si je prend du recule, je me dis que le… Lire la suite »

Mathilde

Bonjour, Par rapport au fait que la violence faite aux hommes est moins citée, ou plus tabou, je ne suis pas d’accord parce que j’ai entendu cet argument (“ça existe aussi mais personne n’en parle”) plein de fois. Après, il y a quand même un fait évident : les hommes sont la plupart du temps beaucoup plus forts, donc leur violence fait plus mal, quelle que soit leur intention de blesser au départ. Aussi, dans les 3/4 des cas, les hommes tués par leur compagne les battaient avant (j’ai trouvé cette info ici : donc peut-être que dans certains cas… Lire la suite »

Scellier

Il y a la violence physique mais aussi la violence morale, et là, les femmes peuvent faire autant de mal que les hommes…Cette violence-là est moins visible mais peut être très douloureuse et destructrice également…Il faut beaucoup de patience et d’estime de soi pour que la victime ne succombe pas à la violence insidieuse des manipulateurs, qui peuvent être des deux sexes…

Azi

Des hommes tuent leurs compagnes, car ils le peuvent.
Des femmes donnent la vie car elles le peuvent.
Quelle responsabilité d’avoir entre ses mains le pouvoir d’ôter ou de donner la vie.

Carl Roque

La video m’a mis très mal a l’aise elle fait dans le man bashing a fond: les hommes sont dangereux… On nous le rabache sans aucune nuance, comme on nous dit que les femmes sont toujours victimes , ce sont les nouveaux “stéréotypes de genre”…. la vérité est tellement plus nuancée, il existe quelques prédateurs, hommes (et femmes) il est nécessaire d’informer et défendre les enfants des deux sexes, et cesser d’accuser les hommes de tous les crimes.

Carl Roque

Pourquoi je me sens mal a l’aise? oui j’ai souffert très directement de la violence d’une femme, et j’en ai vu un certain nombre avec des comportements très violents envers leurs enfants ou leur compagnons. Je n’ai pas eu beaucoup d’aide ni de considération, personne n’en parle, personne ne le reconnait. Je connais par ailleurs beaucoup d’hommes bons, généreux etc… et j’ai beaucoup de mal a encaisser le battage a sens unique. La vérité est nuancée mais de nos jours la nuance n’est pas de mise, on cède vite a la pensée paresseuse en simplificatrice. Eduquer les filles avec la… Lire la suite »

Carl Roque

J’apprécie votre commentaire, toutefois, il serait bon de consulter les chiffres de violence conjugale donnés par les dernières enquêtes officielles, pour bien comprendre que ces violences sont beaucoup plus équilibrées entre sexes que ce qui est dit dans tous les médias. Les chiffres qui sont les plus cités sont ceux d’une enquête de 2007 qui n’interrogeait que des femmes, et ceux des décès, ce qui ne donne qu’un aspect restreint des violences. Il n’est pas inutile non plus de regarder ceux qui concernent la violence contre les enfants et qui ne sont jamais cités bien que faisant plus de deux… Lire la suite »

Scellier

Tout à fait d’accord avec vous, Monsieur Perronnet. Merci de nous aider à prendre du recul par rapport aux choses et à avoir une pensée plus libre…Une victime reste une victime, quel que soit son sexe…Quand on sait à quelles souffrances et parfois à quelles tragédies les actes de violence peuvent conduire, il es bon de nous inciter à prendre conscience de nos paroles et de nos gestes pour éviter d’en produire des mauvais….

Marie

Oui entendre mes frères dire je ne suis pas une femmelette moi devant tout le monde sans ne jamais entendre personne ne rien dire j’ai fini par penser que d’être une femme n’est pas bien. Cette vidéo permet de prendre conscience que si on ne dit rien on est complices et de prendre conscience que toutes ces petites remarques anodines finissent par devenir ancrées en nous et pour faire le chemin inverse c’est long et difficile mais pas impossible comme vous me le dites si bien mais si on peut éviter ce chemin à nos enfants c’est mieux.

marianna

Bonjour, et quand le père n’est pas là, ou pére absent ou mauvais père ? Moi j’ai perdu mon père à huit ans et il n’était pas beaucoup présent. Par contre j’ai eu une mère formidable mais pas parfaite non plus sa n’existe pas de toute façon. La mauvaise construction je l’ai comprise un peu tard. Le respect en tant que femme je n’ai pas su l’employer, par contre j’ai réussis le respect de mes enfants. J’ai un garçon et je crois que par moi, il respecte “la femme”.
Merci sa fait du bien de s’exprimer.

Scellier

Très beau texte, qui demande réflexion…Effectivement, les insultes, quelles qu’elles soient, ne devraient pas être tolérées, dès le plus jeune âge, car elles peuvent être terriblement meurtrières, même dites sur un ton anodin…
Je souhaite à toutes et à tous de joyeuses fêtes, dans la paix et le respect mutuel, pour le bonheur de l’Humanité!

Claude

Encore une fois, merci pour vos articles, où vous voyez nettement plus loin que le bout de … nos conditionnements. Ce “Mais c’est pas grave, c’est juste pour rire !”, on le rencontre aussi dans plein d’autres domaines : à propos des homosexuels, des gens d’autres cultures, et je ne sais quoi encore. Je pense ici à des personnes qui font des « fines plaisanteries » sur les « pakpaks » et les « bamboulas », sans doute parce qu’ils trouvent ces mots « rigolos » (« c’est pour rire, bien sûr ! ») ; qui disent d’un plat pimenté… Lire la suite »

Carl Roque

Peut être devriez vous apprendre à connaître les hommes. Ils ne sont pas comme on vous les décrit dans la vidéo. Les violents sont une infime minorité .

Nita

Minorité dont sont complices tous ceux qui continuent à propager cet “humour” sexiste.

Chris

Je suis un homme et père de 2 filles de surcroît (10 et 5 ans).
C’est vrai que cet article dépeint un sexisme (trop) ordinaire dans notre société, hypersexualisée par les médias notamment. Et je ne peux éviter de me dire que ces risques n’arrivent pas qu’aux autres…
Alors pour me remettre du texte, terrible et affreusement noir, retranscrit dans cet article, je vais relire le précédent, intitulé… “N’ayez pas peur”

Marie

Merci, en mettant cette vidéo et en reconnaissant les faits je me sens comprise et ça c’est un premier pas vers l’avancement pour les femmes. MERCI.

Christine

Excellente cette initiative mais qui omet toutefois de citer LA femme comme l’un des principaux dangers pour LA femme. En participant et en étant elle-même bourreau de sa propre fille en répliquant les schémas dans lesquels elle a été élevé
Ou en essayant de répliquer l’attitude machiste et dégradante de ce qu’elle a subit elle-même de la part des garçons, des hommes de sa propre famille. Pour essayer elle-même de se protéger en adoptant la même attitude que ses agresseurs.