Question d’Estelle :
Mère.
Je tiens tout d’abord à vous remercier pour tout le travail que vous faites sur ce site, c’est formidable, si vous pouvez m’aider j’ai moi aussi de gros soucis de comportements avec ma fille aînée, il m’arrive de vouloir qu’elle disparaisse quand elle fait de simples bêtises, je m’en veux de ne pas être une bonne mère pour elle, pour mes autres enfants je ne sais pas pourquoi mais je ne réagis pas du tout de la même façon, c’est horrible, je lutte contre moi-même pour ne pas qu’elle vive un enfer par ma faute mais parfois je déborde de méchanceté, j’ai de gros soucis par ailleurs avec mon enfance, mon père ne m’a jamais laissé vivre il me battait et me manipulait psychologiquement jusqu’à ce que je parte de la maison à 20 ans pour me marier parce que j’étais enceinte, la situation est figée nous faisons comme si de rien n’était mais j’ai envie de couper les ponts pour enfin pouvoir repartir à zéro, je n’ose pas, j’ai peur de me retrouver toute seule. Mon mari est un trésor mais malheureusement nous ne sommes pas heureux. Mon attitude et mon stress surtout vis à vis de la grande gâche tout. Je n’apprécie même plus un ciel bleu. Je vous demande de bien vouloir m’aider surtout pour ma fille aînée, je veux qu’elle puisse s’épanouir à sa façon, et j’aimerais pourvoir l’aider à cela et pas l’inverse. Merci beaucoup.
Ma réponse :
Oui Estelle, quand il vous arrive de vouloir que votre fille disparaisse alors qu’elle fait de simples bêtises, vous pouvez être certaine que cela ne correspond pas à votre nature qui serait « mauvaise », mais à des données inscrites en vous, causées par votre passé, votre enfance.
Vous n’êtes pas « une mauvaise mère » mais ces données inscrites en vous à la suite de maltraitances vécues, ressurgissent dans des circonstances présentes précises qui réactivent ces moments traumatisants passés.
La première chose à voir et à reconnaître est que si vous « débordez de méchanceté » ce n’est pas parce que « vous êtes » méchante, mais parce que votre colère refoulée déborde. Ce n’est donc pas en « luttant contre vous-même » que vous parviendrez à calmer cette colère refoulée (là, vous ne réussirez qu’à la refouler davantage donc qu’à lui donner plus de force encore) mais au contraire en vous y ouvrant dans le contexte d’un sérieux travail thérapeutique. Trouver quelqu’un qui comprendra votre souffrance, c’est vous permettre de la libérer. Pour cela je vous invite à lire mon article : Se situer et trouver le bon thérapeute.
Bien sûr, je ne peux que comprendre qu’une part de vous-même lutte contre une autre part de vous-même afin que votre enfant « ne vive pas un enfer », mais attention, là se trouve un très grand écueil : vous ne pouvez rien réussir dans la division et la lutte contre vous-même. Il n’est possible de retrouver la paix que dans la vision lucide de « ce qui a été ».
Regardez, considérez très sérieusement ce que vous partagez à la suite : « mon père ne m’a jamais laissé vivre il me battait et me manipulait psychologiquement », c’est de ce côté que vous avez à vous pencher pour comprendre les réactions qui sont les vôtres.
Vous n’avez certainement jamais osé vous confronter à la révolte et à la colère qui sont en vous. Tant que vous ne l’aurez pas fait, (donc tant que vous n’aurez pas osé vous confronter à la vérité émotionnelle de votre vécu), ces données, inscrites en vous, continueront d’influencer vos comportements, quitte à vous culpabiliser, à vous désespérer par la suite. La politique de l’autruche du « faire comme si de rien n’était » ne résoudra jamais vos difficultés, au contraire. Votre violence, (ce que vous appelez votre « méchanceté ») a besoin d’être reconnue et accueillie en vous, parce que derrière cette violence, il y a un être humain traumatisé qui n’a encore jamais eu l’opportunité de se reconnaître tel quel.
Soit, vous avez l’impression de « gâcher tout », et pour le moment vous ne pouvez pas vous y prendre autrement, mais le seul moyen de ne pas faire perdurer ce gâchis est de vous mettre à l’écoute de vous-même pour pouvoir vous mettre à « l’expression », « au grand jour » de vous-même en renonçant totalement à nier les souffrances que vous avez connues. A l’inverse, continuer de vous négliger en ayant honte et en culpabilisant est le meilleur moyen de renforcer ce que vous ne voulez plus. Renoncer à votre propre refoulement c’est « lever l’enchantement » qui vous condamne à faire du mal aux autres.
Votre premier pas est donc d’oser vous aider « pour vous-même » (la femme en vous qui est mère et qui veut être mère, ne peut pas faire l’économie de se confronter à son passé) et c’est parce que vous vous serez aidée « pour vous-même » que tout naturellement, je vous l’affirme, votre relation à votre fille aînée se détendra et que, comme vous le dites si justement, elle pourra « s’épanouir à sa façon. »
Il est donc nécessaire que vous vous tourniez vers vous-même, si vous voulez la « sauver », retrouver l’harmonie perdue au coeur de votre famille, c’est-à-dire devenir capable d’aimer vraiment.
© 2008 Renaud PERRONNET Tous droits réservés.
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