Les malentendus fondamentaux

« La nature ne pardonne jamais la transgression de ses lois.

Il n’y a pas de pitié dans la nature, elle est inexorable. »

Swami Prajnanpad

Si le malentendu empêche l’accord, c’est la bonne appréciation des choses qui permettra l’harmonie. Vous cherchez l’harmonie ? Voici quelques principes qui – si vous vous y soumettez – vous aideront à trouver l’harmonie avec vous-même et dans votre relation aux autres.

Nos biais de pensée font que nous avons tendance à croire que nous sommes les seuls à avoir des difficultés.

En fait nous sommes nous-mêmes à l’origine de nos propres problèmes quand, mus par l’espoir d’une vie heureuse, nous nous laissons abuser par les habitudes mentales d’une société qui cherche à nous faire croire que la perte, la maladie, la solitude et la mort sont injustes – alors qu’elles sont notre lot à tous.

Même si nous l’arrosons, nous ne pouvons pas avoir la certitude qu’une plante poussera. Personne ne peut être assuré que ses actes auront les conséquences désirées. Personne, jamais, ne peut avoir la certitude que les choses se passeront comme il le veut.

Notre sagesse essentielle réside dans notre capacité à convenir que quand « ce qui est » nous échoit, même si cela ne nous convient pas, nous n’aurons pas d’autre remède pour nous apaiser que celui de nous y adapter en acceptant sans discuter que ce que nous ne voulions pas qui nous arrive nous soit arrivé.

Cela revient à parvenir à être dans une attitude active c’est-à-dire à cesser de nous plaindre en refusant que ce qui nous est arrivé nous soit arrivé.

Swami Prajnanpad disait : « Personne ne vit dans le monde, chacun vit dans son monde. » À force de déni, de refus et de refoulement, nous en arrivons à créer un monde dans lequel nous prenons nos désirs pour la réalité. Un monde dans lequel nous ne pouvons qu’être malheureux.

En vivant dans « notre monde » nous sommes assurés de vivre dans l’illusion et plus dure sera pour nous la chute quand – confrontés au réel – nous découvrirons la perte, la maladie, la solitude et la mort.

Nos refus de ce qui est sont à la mesure de nos espoirs insensés que le monde puisse un jour devenir un reflet de nos désirs, et c’est ainsi que nous nous créons le plus de problèmes.

Cesser de créer des problèmes, c’est commencer par repérer les croyances qui sont les nôtres, à l’origine de nos souffrances psychologiques et morales.

Celles-ci sont principalement de trois ordres :

  1. La croyance que nous sommes tous semblables.

Ainsi on nous a répété depuis l’enfance qu’il nous fallait être conformes aux besoins des autres, (quitte à nous trahir nous-mêmes) et que – par réciprocité – les autres devaient nous entendre, nous comprendre et nous accepter, que s’ils ne le faisaient pas, on était légitime à le leur reprocher.

  1. La croyance que l’erreur devrait et pourrait être évitée.

Ainsi on nous a convaincus que l’erreur nous empêchait de progresser et que tout l’art était de parvenir à ne pas en faire puisqu’on nous a fait croire qu’elles nous engageaient définitivement.

  1. La croyance que nos actions ne prêtent pas à conséquence.

Ainsi on nous a convaincus de notre individualisme en nous poussant à croire que nos actions n’engageaient que nous et qu’elles pouvaient ne pas avoir de conséquences. On nous a fait croire que nous étions indépendants des autres et que nous pouvions faire ce que nous voulions sans que cela ait de conséquences pour l’ensemble.

 

Or force est de constater que ces croyances donnent lieu à toutes sortes de méprises et de confusions, sources de déboires et de souffrances, puisqu’à travers elles, nous cherchons à calquer nos attitudes et nos comportements non pas sur le monde tel qu’il est mais sur la projection que nous faisons du monde tel que nous aimerions qu’il soit.

Pour accéder à une nouvelle qualité de vie, pour se désengager peu à peu des différentes causes de souffrance (conflits avec nous-même et avec autrui, insatisfactions et frustrations) et peut-être même en arriver à vivre joyeusement, il nous faudrait donc ne plus voir le monde et les autres à travers ces prismes qui les déforment immanquablement mais les voir et les intégrer tels qu’ils sont, ce qui impliquerait de considérer que nous sommes des individus finis et limités assujettis à trois vérités fondamentales que Swami Prajnanpad (inspiré par les Upanishads1) nomme les « lois de la vie2 » et qu’il importe de garder constamment à l’esprit pour les intégrer dans notre existence :

La loi de la différence : Tout ce qui n’est pas nous est différent de nous.

Si tout ce qui n’est pas nous est différent de nous, chaque être est unique, donc incomparable. De même le jugement sur autrui est aberrant puisque nous jugeons toujours par rapport à nous et que chacun est comme il est. Enfin l’attente est illusoire, elle ne peut pas être satisfaite puisque l’autre est imprévisible. Si nous n’attendons pas que l’autre soit conforme à nos désirs, si nous ne vivons pas selon cet espoir, nous ne souffrirons pas que l’autre ait fait d’autres choix que les nôtres. (« Attendez-vous seulement à une chose : rien n’ira comme vous le voulez. » disait Swami Prajnanpad)

Dans un tel contexte nous ne pouvons qu’être bienveillants et compréhensifs à l’égard de ce qui est, donc des personnes et des situations qui s’offrent à nous.

La loi du changement : Tout ce qui existe est en changement constant.

Si nous sommes conscients de la loi du changement, nous nous libérons de la tristesse et du sentiment d’insécurité. Dans un monde régi par l’impermanence des choses et des êtres, il est vain de s’accrocher à quoi que ce soit (situations, objets, personnes). Puisque tout passe, il est préférable de s’émerveiller en s’ouvrant au renouvellement incessant de la vie, à ce « festival de la nouveauté » comme l’appelait Swami Prajnanpad.

La loi de l’interdépendance : Pour toute action, il y a une réaction égale et en sens opposé.

Dans ce monde constitué à la fois de différences et de changements, il y a juste une succession ininterrompue de causes et d’effets, il n’y a donc ni bien ni mal absolu, tout bien est relatif à un mal et réciproquement. Celui qui vérifiera sans cesse à travers son expérience que tous les phénomènes sont interdépendants donnera toute sa place au relatif en devenant capable de ne jamais attribuer de valeur absolue à une action et à ses conséquences.

Ainsi notre bonheur ne dépend plus des circonstances extérieures mais de notre capacité à reconnaître la perfection de l’instant présent. Si l’avenir nous tourmente et que le passé nous retient, c’est que le présent nous échappe. Or seul le présent est réel et – pour celui qui vit de minute en minute, de seconde en seconde – rien ne peut jamais diminuer ou augmenter la réalité de ce présent.

« Être » ne peut être conjugué ni au passé ni au futur.  Seulement au présent. Qui crée alors le passé ou le futur ?  Seulement le mental. Le mental qui n’accepte pas le changement, la différence. » disait Swami Prajnanpad.

© 2025 Renaud PERRONNET Tous droits réservés.

Notes :

1. Ensemble de textes philosophiques, écrits entre 800 et 500 av. JC, qui forment la base théorique de l’hindouisme, et qui révèlent la marche de l’univers.

2. Pour aller plus loin, je vous invite à lire le livre de Daniel Roumanoff : Swami Prajnanpad, Un maître contemporain, Vol. 1 : Les lois de la vie, Éditions La Table Ronde, 2002.

Illustration :

Ying-yang psychédélique.

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