Comment s’apaiser face à une menace potentielle ?

Question posée par Sophie.

Un exemple : « Pourvu que mon mari, avec lequel je suis en instance de divorce, ne cherche pas à me retirer la garde de mes enfants. »

On comprendra que face à une menace potentielle, la peur est légitime. Cela signifie qu’il ne sert à rien de se dire qu’on ne devrait pas avoir peur. Il ne s’agit pas d’un fantasme, on a peur de la menace parce qu’on sait pertinemment qu’elle peut se réaliser, elle nous pend au bout du nez.

Pour tenter de s’apaiser, il n’y a pas d’autre moyen que de regarder en face la réalité (plutôt que de tenter de la fuir en se racontant des histoires auxquelles on ne croira pas soi-même).

Évaluer la menace en face c’est mesurer de manière réaliste sa force potentielle.
Puis s’atteler à distinguer avec rigueur – dans le domaine de l’action – « ce qui dépend de nous » de « ce qui ne dépend pas de nous ».

« Parmi les choses qui existent, les unes dépendent de nous, les autres ne dépendent pas de nous. Dépendent de nous : jugement de valeur, impulsion à agir, désir, aversion, en un mot, tout ce qui a affaire à nous. Ne dépendent pas de nous, le corps, nos possessions, les opinions que les autres ont de nous, les magistratures, en un mot, tout ce qui n’est pas notre affaire à nous. »

Épictète

Enfin agir, à fond, par rapport à ce qui dépend de soi, ce qui revient à faire tout ce qui est en notre pouvoir en ne laissant rien dans l’ombre, plutôt que de rester comme hypnotisé(e) par la menace en n’agissant pas, sous le prétexte que les choses vont nécessairement mal se passer.

Par exemple, si ma relation avec ma belle-mère est bonne, je lui parle (même s’il est difficile pour moi de le faire), de manière à ce qu’elle perçoive l’enjeu de ma position de mère et qu’elle m’aide à convaincre mon ex de ne pas me retirer la garde de mes enfants.

A l’inverse si j’entretiens avec elle une relation tendue, j’évite de risquer de mettre de l’huile sur le feu en partageant mes craintes avec elle. Par contre je m’entretiens de manière rigoureuse avec mon avocat. Au besoin j’en change si je ne l’estime pas assez actif.

Il s’agit de « faire tout ce que l’on a à faire » en osant sentir que si on le fait il y a de fortes chances qu’on réussisse à faire pencher la balance de son côté.

Penser par exemple : « Il ne sert à rien que je m’entretienne avec mon avocat puisque le juge ne va consacrer que 10 minutes à mon dossier » n’est qu’une pensée qui – si vous lui obéissez – sera inhibitrice de « ce qui dépend de vous ».

Il n’y a pas de doute, vous avez à le faire, alors faites-le sans vous poser de questions !

Il s’agit d’arriver à ressentir « dans ce contexte précis, j’ai fait tout ce que j’avais à faire », et là de pouvoir se dire « advienne que pourra », puisque je sais que je ne suis pas le maître exclusif de la situation.

C’est donc parce que j’ai fait ce que j’avais à faire (dans le domaine dont je suis responsable), que je deviendrai capable de m’apaiser.

Si vous sentez… « oh ! il y a encore cela que je peux faire », et que vous ne le faites pas, vous serez aussitôt harcelé(e) par vos doutes face à la menace potentielle.

Ainsi pour parvenir à la paix face à une menace potentielle, il n’y a pas d’autre alternative que de faire tout ce que l’on a à faire même si on redoute de le faire. Le reste s’équilibrera de lui-même.

Pour aller plus loin vous pouvez lire mon article : La vie n’est pas injuste mais elle est cruelle. Mais aussi, j’invite ceux qui doutent encore de la vertu de l’action face à une menace potentielle, à regarder le très intéressant film des frères Dardenne « Deux jours, une nuit » (2014) qui illustre admirablement ce thème.
On y voit une femme dépressive (Sandra, remarquablement interprétée par Marion Cotillard), se confronter à une douzaine de ses collègues afin de les convaincre de renoncer à leur prime pour qu’elle puisse garder son travail.
Après toutes sortes de rebondissements, cette femme (soutenue par son mari) – bien que désespérée et suicidaire – trouve en elle, le courage et la force de se battre.
En définitive elle perdra son combat, son patron lui proposant un marché qu’elle jugera indigne d’accepter, mais sa dernière parole sera : « On s’est bien battus, je suis heureuse. »
Ce film nous montre de manière magistrale que quelle que soit l’issue d’un combat, le simple fait de l’avoir mené à son terme en respectant sa propre dignité suffit à nous rendre heureux.

Illustration : Marina Krasnitskaya, Mélodie du Sud – Apaisement.

© 2020 Renaud PERRONNET Tous droits réservés. 


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