Les racines de la violence

“Si le seul moyen de préserver le moi consiste à perdre autrui, alors l’enfant ordinaire préfère renoncer à son moi.”

Abraham Maslow.

“Car je préfère avoir des crises et te plaire plutôt que te déplaire et de n’en point avoir.”

Marcel Proust, lettre à sa mère.

Avant propos : Comprendre les causes originelles de la violence, c’est pouvoir ne plus se laisser enfermer dans des croyances manichéennes du type : “Dans la vie, il y a les gagnants et les perdants, on ne peut pas en sortir !”. C’est aussi faire renaître l’espoir :

  • L’être humain n’est pas condamné à reproduire indéfiniment les mêmes comportements appris.
  • Le meilleur service que nous puissions lui rendre, s’il le désire, c’est de l’aider à voir les mécanismes qui – chez lui – font qu’il agit comme il agit.

Donc comprendre que les comportements sans cause n’existent pas, que “tout comportement absurde révèle sa logique jusqu’alors cachée, dès l’instant où les expériences traumatiques de l’enfance ne restent plus dans l’ombre.” (A.M.)

Alice Miller est docteur en philosophie et psychothérapeute. Chercheuse, elle se consacre, depuis 1980, à l’étude des causes des mauvais traitements infligés aux enfants, et à leurs conséquences sur la vie d’adulte. “L’opinion publique est loin d’avoir pris conscience que ce qui arrivait à l’enfant dans les premières années de sa vie se répercutait inévitablement sur l’ensemble de la société, et que la psychose, la drogue et la criminalité étaient des expressions codées des expériences de la petite enfance… Ma tâche est de sensibiliser cette opinion aux souffrances de la petite enfance, en m’efforçant d’atteindre chez le lecteur adulte l’enfant qu’il a été.” (A.M.)

Pour aller plus loin, vous pouvez :

– cliquer ICI

– lire : “C’est pour ton bien. Racines de la violence dans l’éducation de l’enfant.” (Aubier. 1984.) “L’avenir du drame de l’enfant doué” (Presses Universitaires de France. 1996.) “Notre corps ne ment jamais” (Flammarion. 2004.)

Le tract d’Alice Miller :

Depuis quelques années, il est scientifiquement prouvé que les effets dévastateurs des traumatismes infligés à l’enfant se répercutent inévitablement sur la société. Cette vérité concerne chaque individu pris isolément et devrait – si elle était suffisamment connue – conduire à modifier fondamentalement notre société, et surtout à nous libérer de l’escalade aveugle de la violence.

Les points suivants voudraient préciser cette thèse :

1. Tout enfant vient au monde pour s’épanouir, se développer, aimer, exprimer ses besoins et ses sentiments.

2. Pour s’épanouir, l’enfant a besoin du respect et de la protection des adultes, qui le prennent au sérieux, l’aiment et l’aident à s’orienter.

3. Lorsque l’enfant est exploité pour satisfaire les besoins de l’adulte, lorsqu’il est battu, puni, manipulé, négligé, qu’on abuse de lui et qu’on le trompe, sans que jamais un témoin n’intervienne, son intégrité subit une blessure inguérissable.

4. La réaction normale à sa blessure serait la colère et la douleur. Mais, dans la solitude, l’expérience de la douleur lui serait insupportable, et la colère lui est interdite. Il n’a d’autre solution que de réprimer ses sentiments, de refouler le souvenir du traumatisme et d’idéaliser ses agresseurs. Plus tard, il ne sait plus ce qu’on lui a fait.

5. Ces sentiments de colère, d’impuissance, de désespoir, de nostalgie, d’angoisse et de douleur, coupés de leur véritable origine, trouvent malgré tout à s’exprimer au travers d’actes destructeurs, dirigés contre les autres (criminalité, génocide) ou contre soi-même (toxicomanie, alcoolisme, prostitution, troubles psychiques, suicide).

6. Devenu parent, on prend souvent pour victime ses propres enfants, qui ont une fonction de bouc émissaire: persécution pleinement légitimée par notre société, où elle jouit même d’un certain prestige dès lors qu’elle se pare du titre d’éducation. Le drame, c’est que le père ou la mère maltraite son enfant pour ne pas ressentir ce que lui ont fait ses propres parents. Les racines de la future violence sont alors en place.

7. Pour qu’un enfant maltraité ne devienne ni criminel, ni malade mental, il faut qu’il rencontre au moins une fois dans sa vie quelqu’un qui sache pertinemment que ce n’est pas lui, mais son entourage qui est malade. C’est dans cette mesure que la lucidité ou l’absence de lucidité de la société peut aider à sauver la vie ou contribuer à la détruire. Ce sera la responsabilité du personnel d’assistance sociale, des thérapeutes, des enseignants, des psychiatres, des médecins, des fonctionnaires, des infirmières.

8. Jusqu’à présent, la société a soutenu les adultes et accusé les victimes. Elle a été confortée dans son aveuglement par des théories qui, parfaitement conformes aux théories de l’éducation de nos arrière-grands-parents, voient en l’enfant un être sournois, animé de mauvais instincts, fabulateur, qui agresse ses parents innocents ou les désire sexuellement. La vérité, c’est que tout enfant a tendance à se sentir lui-même coupable de la cruauté de ses parents. Les aimant toujours, il les décharge ainsi de leur responsabilité.

9. Depuis quelques années seulement, l’application de nouvelles méthodes thérapeutiques a permis de prouver que les expériences traumatiques de l’enfance, refoulées, sont inscrites dans l’organisme, et qu’elles se répercutent inconsciemment sur la vie entière de l’individu. De plus, des ordinateurs qui ont enregistré les réactions de l’enfant dans le ventre de sa mère ont révélé que le bébé sent et apprend, dès le tout début de sa vie, la tendresse aussi bien que la cruauté.

10. Dans cette nouvelle optique, tout comportement absurde révèle sa logique jusqu’alors cachée, dès l’instant où les expériences traumatiques de l’enfance ne restent plus dans l’ombre.

11. Dès que nous serons sensibilisés aux traumatismes de l’enfance et à leurs effets, un terme sera mis à la perpétuation de la violence de génération en génération.

12. Les enfants dont l’intégrité n’a pas été atteinte, qui ont trouvé auprès de leurs parents la protection, le respect et la sincérité dont ils avaient besoin, seront des adolescents et des adultes intelligents, sensibles, compréhensifs et ouverts. Ils aimeront la vie et n’éprouveront pas le besoin de porter tort aux autres ni à eux-mêmes, encore moins de se suicider. Ils utiliseront leur force uniquement pour se défendre. Ils seront tout naturellement portés à respecter et à protéger les plus faibles, et par conséquent leurs propres enfants, parce qu’ils auront eux-mêmes fait l’expérience de ce respect et de cette protection, et que c’est ce souvenir-là, et non celui de la cruauté, qui sera inscrit en eux.

© Alice Miller.


Téléchargez gratuitement ce tract d’Alice Miller, au format PDF, en cliquant sur le bouton : 


Pour aller plus loin je vous invite vivement à lire le livre d’Alice Miller “Notre corps ne ment jamais”, si vous ne l’avez pas, vous pouvez en écouter gratuitement la lecture en cliquant sur ce lien (Durée 5h05).


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Lacomme

Bonjour
J’ai 26 ans je suis marié maman de deux enfants 4 ans et 1 ans je suis quelqu’un de très agressive pourtant il n’y as pas toujours lieu d’être … Je le suis avec mon mari ma famille ce qui engendre d’énorme dispute nous sommes au bord de la rupture j’ai besoin de conseil pour géré au mieux ma façon de communiquer avec lui
Merci d’avance de votre réponse.

Elodie

Bonjour je suis une jeune fille de 26 ans, lui en a 29, un peu d’un an de couple et les disputes ne font que s’aggraver. Nous nous sommes séparés 3 fois mais chaque fois il me manque et je m’en veut de le laisser dans son malheur…J’ai l’impression de l’abandonner. Il ne m’a jamais frappée mais est très violent, tape dans les mur, jette des objets, chantage affectif et insultes… Il m’a craché dessus il y a trois jours donc nous avons une fois de plus rompu. Enfance difficile, abandonné par sa mère, maltraité par la nouvelle femme de… Lire la suite »

cathy

Comment peut-on maîtriser sa colère pour ne pas venir à la violence? Qu’est-ce qu’il faut faire? Je pensait que j’ai eu une enfance normale. Mais en lisant ce que vous avez écrit plus haut, je sais maintenant que non. Je suis en train de recommencer cette violence (verbale, puis physique) à mes enfants (en pensant que c’est l’éducation, que j’agis ainsi pour leur bien). Quelle méthode thérapeutique me suggérez-vous?

Bernard

Cet article et le tract d’Alice Miller m’aident encore mieux à comprendre pourquoi je suis toujours célibataire (mais pas ermite!). J’ai toujours refusé de me “reproduire” car j’ai toujours refusé non seulement de donner un “héritier” ou une héritière (demande suspecte à mes yeux de mon père), mais surtout de reproduire avec ma supposée famille un comportement que je réprouve car si cela avait été le cas, j’aurais pratiqué ce que je condamne et me serais mis au même niveau. Les deux points de l’avant propos résument tout à fait ma propre démarche: briser une spirale infernale et déterminer ce… Lire la suite »

Bernard

J’ai toujours senti que tant que je n’aurais pas tiré les choses au clair, j’aurais été un danger public pour mon éventuelle famille, c’est à dire que j’aurais fait subir aux autres ce que j’ai subi, involontairement ou même volontairement. On ne peut pas demander aux autres de nous servir de béquille ou de compenser nos manques, et il faut une certaine assise que je n’avais pas. Mes parents ne m’ont pas persuadé de quelque malédiction, c’est moi qui ai refusé de leur ressembler, donc de continuer malgré moi un comportement que je réprouve en étant un violent, en me… Lire la suite »

espoir

Depuis 2 ans que je vis avec mon ami, tous les trimestre environ, il me frappe violemment suite à une dispute qui dégénère. J’ai été déposé une main courante à la gendarmerie et il a enfin pris conscience de ses actes (me semble t il). Je lui ai conseillé de voir un médecin et il a pris les choses en main et s’en est trouvé un. Les délais étant long, il ne commencera que dans quelques semaines. On est censé se marier dans 3 mois. D’après vous, est il possible de guérir de cette violence si on est accompagné et… Lire la suite »

aur

Je suis dans ton cas, sauf que je me suis mariée, ce fut une erreur…car malgrès les soins apportés par les psy, ça ne se guerri pas…..a notre grand malheur….soit courageuse, et prend la meilleur decision!

dijoux

Bonjour, je vous ecris car je suis victime de violence. Apres 4ans de vie ensemble nous avons decidé de faire un bébé (j’ai 24ans lui en a 36 ). La venue du bébé a fait remonté a la surface ses blessures (peres violents envers sa mere). Pendant ma grossesse il s’est eloigné de moi, et s’est rapproché d’une autre, dit il, par peur de devenir pere. Il dit etre amoureux de moi, mais continue sa relation avec l’autre, bébé a un mois. Lorsque l’on parle de l’autre FEMME, il s’enerve, me dit que ce n’est rien, et que c’est moi… Lire la suite »

lili

autant la violence physique est identifiable, condamnable et rejetable, autant la violence morale est plus pernicieuse et plus difficilement discernable …; du moins pour ce qui me concerne. pour y avoir été soumise pendant une longue periode de ma vie, j’ai encore bien souvent du mal à l’identifier, à la quantifier et à savoir ce qui est acceptable ou non . ceci est une question qui me prend une énorme énergie dans mes relations au quotidien.

anonyme

J’ai rencontré mon ami, marié depuis 15ans, 2 enfants, je lui ai dit que je ne voulais pas étre sa maitresse, il a quitté sa femme en 1 semaine et a mis en route l’instance de divorce. Nous sommes tous les 2 gérants d’un parc de loisir et nous vivons sur place, dans quelques jours nous allons “féter” nos 1 an. Le probléme c’est que nous passons notre temps à nous engueuler, il m’éclate la téte contre les murs il me traine dans l’allée de notre maison toutes les 2 semaines je suis obligé de m’enfuir et d’aller dormir dehors… Lire la suite »

MIRA

Votre situation est difficile, bien entendu, car en le quittant vous laissez votre travail et vous vous retrouvez sans logement. Et là commence les difficultés. Mais finalement, ne vaut-il pas mieux repartir de zéro plutôt que d’accepter cette violence, cette vie malsaine? Ne laissez pas cet homme vous traiter ainsi, vous humilier et vous détruire petit à petit. Il n’a aucun droit sur vous, alors même s’il n’est pas d’accord que vous le quittez, c’est votre choix! C’est votre décision et il ne pourra que l’accepter. Vous serez d’autant plus, plus forte et fière de vous d’avoir dit stop, de… Lire la suite »

nane

bonjour sais tres juste de ce que vous aver ecrit jaurait bessoin de votre aide car g ete battu est maltraiter est mon mari aussi la ont atend un bebe ( notre amour ) car ont laime deja bcp ont se dit que jamais ont va reproduire sa mais g peur de moi mais instant de colere penser vous reellement que je puisse reproduire sa merci de votre reponse

faiza

JE SUIS VIOLENTE CONTRE MON MARI ET J ‘AI BESOIN UN AIDE SVP DONNEZ MOI DES CONSEILLES
MERCI.

Marie-Josée

Profession : Etudiante Ville : Montréal Pays : Canada J’ajouterai en 7 : La famille et tout être en relation avec l’enfant à un rôle à jouer dans le processus de guérison. Pour l’enfant maltraité, il y aura toujours un souvenir d’avoir rencontré quelqu’un de respectueux et aimant qui va favoriser son dévellopement et sa croissance futur dans son estime et sa résilience. Et si cette croissance n’est pas survenue pendant l’enfance ce sera au conjoint d’exprimer et souligner avec amour et empathie et dans le respect de l’autre qu’il ne faut pas reproduire ce schéma. Au risque de se… Lire la suite »

Sabine

J’ai mon copain qui a vecu une enfance tres difficile il a ete battu mal traité de la part de ses parent maitenen il est adulte il a 30ans il devien tres violent et agressive a vec moi il ma frapé plusieurs foix mais a chaque foix il me fait de la paine et je revien vere lui svp aider moi comment faire avec lui pour avoir une consience tranquil je ne paux pas le laissé tembe parce que je sais que ce la le rendrai encor plus agressive et sourtou que on habite l’algerie y apas des centre pour… Lire la suite »

Raama

Profession : Travailleur social.
Ville : Quatre Bornes.
Pays : Ile Maurice.

Je n’ai que des remerciements à exprimer à Mme Alice Miller d’avoir éclairé ma vie. Ses écrits sont plus significatifs que tous les livres sacres réunis ! Car c’est maintenant que je suis en mesure de comprendre ce que c’est que d’être « humain ». Merci.