Le loup et l’agneau

Vous appréciez la gazelle légère et fragile, alors vous vous efforcez de la protéger du lion. Cependant, vous constatez que le lion, bien que majestueux dans sa puissance, dépérit et risque de mourir de faim s’il n’a plus de proies à se mettre sous la dent.

Alors que faire ?

Le lion a une raison légitime de vouloir manger la gazelle : il a faim et cherche à survivre. La gazelle, quant à elle, a une raison tout aussi valable de ne pas se laisser dévorer : elle veut vivre.

Tout être vivant aspire à la vie, et la vie se nourrit de la vie, c’est une loi naturelle.

Le bien et le mal n’existent pas en soi, ils sont relatifs à la perspective de chacun.

C’est en cherchant à imposer aux autres leur propre conception du bien et du mal que les êtres humains s’égarent. Chacun agit en fonction de ce qui lui apparaît comme un bien au moment où il agit, tout en étant convaincu – aveuglé par sa propre subjectivité – que ses valeurs sont universelles.

Ainsi, dans ce monde dualiste, il convient de comprendre, comme l’affirmait Swami Prajnanpad, que chaque individu agit toujours en fonction de ses propres intérêts, et que cela constitue une règle intangible.

C’est la loi que le bourreau et la victime soient les deux faces d’une même réalité. Celui qui agit pour son propre bien est naturellement en réaction contre le bien de l’autre qui lui apparaît comme un mal.

Enfermés dans une vision manichéenne, nous prenons le plus souvent parti pour la victime contre le bourreau. Ce faisant, nous perpétuons le conflit à l’infini.

Trouver le point d’arrêt du conflit demande à comprendre que le monde est dualiste, c’est-à-dire qu’il est régi par la dynamique du changement : le principe d’action-réaction. Seul l’amour peut mettre fin au conflit car il ne réagit pas : le soleil ne brille-t-il pas pour les victimes comme pour les bourreaux ? Untel me juge, d’accord, il ne peut pas faire autrement que de se refermer sur lui-même et ce faisant, en refusant de m’appréhender comme un autre différent de lui, il se condamne à souffrir.

G. I. Gurdjieff l’énonçait ainsi :

« Tout individu qui vient sur terre se voit confier la garde d’un loup et d’un agneau.

A la fin de sa vie, il doit rendre ceux-ci intacts. Sans que le loup ait mangé l’agneau. Sans qu’il ait tué le loup pour l’empêcher de manger l’agneau. »

Rendre le loup et l’agneau intacts signifie de ne pas sacrifier sa sensibilité, au risque de s’endurcir et de perdre son âme ; mais aussi d’être suffisamment bien situé par rapport à soi-même pour savoir se défendre sans devoir renoncer à son sens de la dignité.

C’est à ce prix – au moyen de l’amour et de la compréhension – que le point d’équilibre entre l’action et la réaction peut être atteint chez l’être humain.

© 2025 Renaud Perronnet. Tous droits réservés

Illustration :

The wolf and the lamb, par Tomasz Alen Kopera

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