L’irritation est l’amie de celui qui cherche à se connaître, à condition qu’il soit d’accord pour la regarder de près plutôt que de la justifier (« c’est normal que je sois irrité après ce qu’il m’a fait ») en se racontant que s’il est irrité c’est forcément de la faute des autres.
Pourquoi en effet serait-ce toujours de la faute des autres ?
Je me souviens que sur son blog une femme réagissait à l’un de mes articles sur la relation parents / enfants dans lequel je développais que quand les parents criaient sur leurs enfants, ils les traumatisaient, et qu’il fallait donc éviter de le faire pour ne pas leur faire du mal.
Elle avait écrit ceci : « Ce discours m’énerve au plus haut point, quand y’en a marre, y’en a marre ! »
On peut trouver deux raisons complémentaires à une telle réaction.
D’une part, il y a des chances que cet article ait parlé d’elle dans son rapport à ses propres enfants, d’autre part ces propos ne l’auraient pas tant irritée si elle n’avait pas dans le fond l’intime conviction qu’ils disaient vrai.
Car nous ne sommes irrités que par ce que nous n’aimons pas chez nous.
« Qui juge se dénonce, qui accuse se défend, qui médit se raconte » dit le proverbe. On pourrait ajouter « qui est irrité se démasque », ou (comme le disent avec simplicité les enfants) : « c’est celui qui dit qui y est. »
Pour reprendre l’exemple cité plus haut, quelqu’un qui parle toujours gentiment à ses enfants ne peut pas être irrité par un article dénonçant les « parents hystériques ».
L’irritation s’avère donc être un bon moyen à notre disposition pour faire apparaître notre inconscient. Notre part d’ombre. Des fonctionnements en nous que nous n’aimons pas et que nous tenons cachés.
En fait nous sommes irrités par nous-mêmes au moment même où nous reconnaissons – en l’autre – le reflet de ce que nous sommes intérieurement et que nous refusons avec obstination d’être.
« Celui qui ne se voit pas lui-même n’arrête pas de parler des autres. Il passe son temps à repérer et à mépriser en autrui des fautes et des faiblesses qui sont en fait camouflées et refoulées en lui-même », explique Swâmi Prajnânpad.
Lorsque nous serons vraiment persuadés que ce qui nous irrite chez l’autre est en nous, plus ou moins caché, nous pourrons nous servir de l’irritation pour mieux nous connaître.
Faisons le pari que puisque pour cette femme il était culpabilisant donc insupportable de convenir qu’il était dommageable pour les enfants de leur « crier dessus », il ne lui restait pas d’autre possibilité – dans la contradiction qui était la sienne – que de justifier ses propos par son débordement émotionnel.
Dès lors que nous refusons quelque chose en nous-mêmes, nous nous condamnons à le refuser chez les autres et – à travers notre irritation – nous nous démasquons.
Car, s’il est vrai que les personnes agissent toujours en fonction de ce qu’elles sont, pourquoi devrions-nous être irrités par elles ?
Si nous sommes d’accord pour que les autres aient les réactions qu’ils ont, l’irritation tombe d’elle-même. Alors nous pouvons entendre leurs propos sans y ajouter notre part émotionnelle.
Sachant cela, nous pourrons peut-être nous réjouir – lors de l’expression de notre prochaine irritation (ou de la suivante !) – d’avoir l’opportunité donc la chance d’apprendre quelque chose sur nous.
© 2015 Renaud & Hélène PERRONNET Tous droits réservés.
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Ma formation première est celle d’un philosophe. Il est possible que les idées émises dans ces articles vous apparaissent osées ou déconcertantes. Le travail de connaissance de soi devant passer par votre propre expérience, je ne vous invite pas à croire ces idées parce qu’elles sont écrites, mais à vérifier par vous-même si ce qui est écrit (et que peut-être vous découvrez) est vrai ou non pour vous, afin de vous permettre d’en tirer vos propres conclusions (et peut-être de vous en servir pour mettre en doute certaines de vos anciennes certitudes.)