Tant que l’on ne comprend pas les causes profondes et le plus souvent inconscientes par lesquelles un être agit comme il agit, il est aisé de le juger en se croyant insensible à son égard.
Si, dans le métro ou l’autobus vous êtes bousculé(e) par une personne qui vous pousse avec force, il est fort probable que vous réagirez de manière agressive et peu aimable. Cependant si, au moment de votre réaction, vous réalisez soudainement que la personne qui vous a poussé est un aveugle qui a tenté de se stabiliser en s’accrochant à vous, votre agressivité disparaîtra instantanément.
Pourquoi ? Parce que c’est le sens que vous attribuez à ce qui vous arrive qui détermine les émotions que vous ressentez face à une situation.
Tant que vous percevez votre gendre comme un être mal intentionné parce qu’il demande la garde exclusive de votre petit fils, vous ne pouvez que le haïr. Mais le jour où vous envisagerez (ce qui est assez peu probable) qu’il a nécessairement une bonne raison d’agir comme il agit, parce qu’il a par exemple lui-même été manipulé par l’un de ses parents durant son enfance, vous vous détendrez et apaiserez votre ressentiment envers lui. Cela vous permettra sans doute d’entrer plus facilement en dialogue avec lui, pour le plus grand bien de tous (votre gendre, votre fille et votre petit fils).
C’est donc notre méconnaissance des causes qui motivent les actes des personnes qui est à l’origine de nos jugements et de notre insensibilité envers autrui.
Tant que nous ne remettrons pas en question notre partialité émotionnelle dans nos jugements sur autrui, nous nous condamnerons à la souffrance et, ce faisant, à immobiliser une situation qui exige une interprétation différente pour pouvoir être dénouée.
Arnaud Desjardins disait : « Non pas je regarde la rose mais la rose est regardée. » (Un entrainement à se décoller de l’ego, de « c’est moi qui voit ».) Non pas « Je regarde mon gendre », à travers mes intérêts égocentriques et mes besoins émotionnels personnels, mais « Mon gendre est regardé », par qui ? Par quelqu’un capable de prendre du recul en faisant un pas de côté, capable de mettre au moins provisoirement sa partialité égocentrique en sourdine. C’est à ce moment précis que le changement pourra commencer, c’est-à-dire que nous deviendrons capables de regarder les situations que l’existence nous propose en envisageant l’autre comme un autre.
Ce faisant, les situations que la vie nous propose cesseront d’être pour nous des impasses inextricables, sources de souffrance. Nous deviendrons plus fluides et adaptables, c’est-à-dire capables de nous harmoniser avec elles avec facilité.
Ce n’est pas que l’on « ne doit pas » juger, mais juste que, dans cette pratique, nous devenons peu à peu incapables de juger. Dès lors qu’on a goûté à cette immense ouverture, on ne peut plus juger parce que l’on sait d’expérience qu’on ne connaît quasiment rien de l’autre et de ses motivations profondes.
« La rose est regardée », c’est un changement de point de vue radical sur l’autre, la capacité douce de sortir de sa prison pour s’ouvrir à l’autre et, par-delà, à l’imprévisibilité de la vie, car celui qui a compris que l’autre existe, qui sent qu’il existe, ne peut définitivement plus faire comme s’il n’existait pas.
© 2025 Renaud Perronnet. Tous droits réservés
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Ma formation première est celle d’un philosophe. Il est possible que les idées émises dans ces articles vous apparaissent osées ou déconcertantes. Le travail de connaissance de soi devant passer par votre propre expérience, je ne vous invite pas à croire ces idées parce qu’elles sont écrites, mais à vérifier par vous-même si ce qui est écrit (et que peut-être vous découvrez) est vrai ou non pour vous, afin de vous permettre d’en tirer vos propres conclusions (et peut-être de vous en servir pour mettre en doute certaines de vos anciennes certitudes.)