Ce jeu qui est le tien
C’est de nous balancer
Au rythme d’une mélodie silencieuse
De nous balancer sur ta balançoire.
Tu nous fais monter jusqu’à la lumière
Et brusquement tu nous précipites
Au fond des ténèbres.
Quand la balançoire remonte
Ce sont des rires joyeux.
Quand elle redescend, ce sont des cris de peur.
Ce trésor qui est le tien
Tu le fais passer de ta main droite à ta main gauche
Et encore et encore.
Assis dans la solitude
Tu rassembles les soleils et les lunes
Et tu les fais tourner sans cesse
Tu les dévoiles et ils sont nus
Puis tu les habilles d’un voile qui nous les cache.
Croyant que les trésors de notre coeur nous ont été arrachés
Nous pleurons des larmes inutiles.
Mais tout est plein et complet
Rien n’a été perdu.
Il n’y a que la balançoire
Sans cesse, qui va et qui vient.
Rabindranath Tagore, Utsarga, Poème 38.